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Stages

L’école des « AsTrôn’Autes »

Dans le cadre de ma recherche de stage, j’ai particulièrement été attirée durant un cours sur le spectre de l’autisme par une toute nouvelle école qui venait d’ouvrir en septembre 2016, l'école des « AsTrôn'Autes ».

 

Adoptant les préceptes de l’orthopédagogie, j’ai effectué les diverses démarches visant à me renseigner au mieux sur cette école. Dans ce cadre, j’ai tout d’abord recherché sur internet toutes les informations disponibles. Cette école ne disposant pas encore d’un site propre, je n’ai trouvé que divers articles de presse annonçant l’ouverture et d’autres, quelque peu négatifs, faisant part de certains dysfonctionnements, d’ouverture précipitée, dénoncés par certains parents.

Ayant analysé toutes les informations à ma disposition, j’ai finalement été convaincue que réaliser mon stage dans cette toute nouvelle structure représentait une réelle opportunité pour moi de me familiariser avec le monde de l’autisme, en m’immergeant pleinement dans le vif du sujet.

 

Présentation

J’ai eu la grande chance d’effectuer mon stage d’observation et d’expérimentation dans la toute nouvelle école des « AsTrôn’Autes », école faisant partie du réseau de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Cette école, créée le 1er septembre 2016, est une école spécialisée de type 2 accueillant une soixantaine d’enfants âgés de deux ans et demi à treize ans avec un handicap modéré à sévère, présentant plus spécifiquement un trouble du spectre autistique (TSA) et envahissant du développement (TED) et nécessitant une pédagogie adaptée à leurs besoins spécifiques.

 

L’équipe de cette école est composée du personnel « enseignants », c’est-à-dire les titulaires de classe (trois en maternelle, une en classe tremplin[1] et cinq en primaire), le maître d’enseignement individualisé, le maître d’activité éducative, le maître de l’éducation sportive, les maîtres de cours philosophiques et le maître de citoyenneté ; du personnel « auxiliaire d’éducation », c’est-à-dire deux éducateurs spécialisés (un en maternelle et un en primaire) ; deux puéricultrices ; des « paramédicaux », c’est-à-dire trois logopèdes et une psychologue. Comme on peut le constater, il s'agit d'une équipe diversifiée et formée à l’autisme, ce qui leur permet de répondre au mieux aux besoins spécifiques des enfants.

La philosophie de cet établissement se résume dans son appellation. En effet, l’école des « AsTrôn’Autes » représente une valeur pour singulariser chacun des élèves avec leurs compétences personnelles (As), la localisation géographique de l’école (Trôn’), et la référence aux enfants porteurs du syndrome du spectre autistique (Autes). Nous pouvons la définir comme la rencontre de deux planètes, dont l’objectif principal est l’enrichissement des uns par les autres. Décrypter la façon de communiquer de ces enfants « différents » permet de tenter de les amener à rencontrer notre planète et à leur apprendre notre « langage ».

Le fonctionnement

 

L’école des « AsTrôn’Autes » est une école d’enseignement spécialisé qui permet de rencontrer les besoins éducatifs spécifiques des élèves en difficulté et qui vise leur épanouissement personnel et leur intégration sociale. Cet enseignement permet à l’élève d’évoluer à son rythme, grâce à un encadrement pédagogique autorisant une individualisation de l’enseignement. Celui-ci est organisé en types et en degrés de maturité pour l’enseignement fondamental et cela en fonction des besoins de l’élève.

 

Cette école délivre donc un enseignement spécialisé de type 2, c’est-à-dire qu’il est organisé pour des enfants ayant un retard mental modéré ou sévère. Pour ce type d'enseignement, il y a quatre degrés de maturité qui sont définis comme suit :

  • maturité I : qui concerne les niveaux d'acquisition de l'autonomie et de la socialisation ;

  • maturité II : qui concerne les niveaux d'apprentissages préscolaires ;

  • maturité III : qui concerne l’éveil des premiers apprentissages scolaires (initiation) ;

  • maturité IV : qui concerne les approfondissements.

 

Cette école propose une pédagogie adaptée et individualisée dans un cadre structuré et organisé, basée sur le programme américain « TEACCH » (Treatment and Education of Autistic and Communication Handicapped Children). Ce programme béhavioriste créé en 1964 par Eric Schopler, un psychologue américain, est traduit en français par « traitement et éducation des enfants autistes et handicapés par la communication ». « TEACCH » met en évidence l’utilisation de programmes individualisés, en s’appuyant sur les compétences et les intérêts de chacun et en respectant la « culture de l’autisme ». En effet, il est important de comprendre les caractéristiques des personnes autistes pour organiser leur environnement et optimiser les chances de réussite.

 

Comme dit précédemment, l’école des « AsTrôn’Autes » est composée de trois classes maternelles, une classe tremplin et cinq classes primaires. Chacune de ces classes accueille jusqu’à sept enfants.

 

Chaque jour, les enfants viennent et repartent avec les bus de la COCOF. Dès lors, les titulaires de classe ne rencontrent les parents que lors des réunions de parents. Pour pallier cet inconvénient, chaque enfant est muni d’un carnet de communication qui permet de faire le lien entre l’école (le titulaire) et la maison (les parents) et de communiquer toute information utile.

 

En ce qui concerne le niveau primaire, la psychomotricité est donnée quatre fois par semaine, la logopédie une fois par semaine pendant trente minutes et le cours de citoyenneté deux fois par semaine.

 

Chaque intervenant peut être amené à apporter son aide aux institutrices en cas de crise d’un enfant, lorsqu’il faut revenir des moments de récréation ou simplement en classe. De plus, lors des moments de repas, la logopède vient plusieurs fois par semaine en classe afin de venir en aide à la titulaire lorsqu’il faut chauffer des plats ou pour travailler la communication dans le cadre de la formulation des demandes qui peuvent être faites, etc.

 

Les moments de récréation sont différents pour les enfants de maternelle et ceux de primaire. En ce qui concerne les primaires, il y a quatre intervenants pour surveiller les enfants. Très souvent, ce sont deux institutrices, l’éducateur du primaire et un surveillant. Durant ces moments, les enfants peuvent s’amuser avec des tricycles, des trottinettes et des vélos sans pédales, ce qui leur permet de se défouler et de diminuer les incidents qui survenaient lorsque tout ce matériel n'était pas encore installé.

 

Des concertations sont organisées tous les lundis et jeudis après-midi avec l’ensemble de l’équipe pédagogique afin de pouvoir discuter de la situation de chaque enfant, de trouver ensemble des pistes de solution pour les problèmes rencontrés, de demander des conseils au niveau du comportement ou des apprentissages, etc.

 

Le projet d’établissement provisoire

 

Cette école propose 11 objectifs :

  1. Construire un Projet Individuel d’Apprentissage (PIA) pour chaque enfant.

  2. Développer l’autonomie personnelle et collective.

  3. Développer la socialisation.

  4. Développer la communication verbale et non verbale.

  5. Initier et développer les apprentissages en adaptation sociale ou scolaires.

  6. Développer l’éducation à la citoyenneté.

  7. Initier et développer les compétences psychomotrices et sportives.

  8. Favoriser les activités de loisirs et de bien-être.

  9. Développer les activités de création et d’expression.

  10. Favoriser la triangulation Parents/tuteurs- école/PMS- partenaires de la santé autour de l’enfant.

  11. Préparer les passages de section (maternel/primaire, primaire/secondaire ou lors d’un changement d’orientation).

 

La Classe des Fusées

J’ai effectué un stage de douze semaines (3 semaines d’observation et 9 semaines d’expérimentation) dans une des cinq classes primaires : la Classe des Fusées, dont Madame N. Coussement est l’institutrice et qui fut donc ma maître de stage.

Cette classe est composée de sept garçons âgés de 6 ans à 10 ans. Quatre d’entre eux sont verbaux et les trois autres sont non verbaux. Cinq de ces enfants présentent un « trouble du spectre autistique » et les deux autres ont des « traits autistiques ».

Parmi les deux enfants ayant des « traits autistiques », l’un des deux va être redirigé vers une autre école en raison d'une déficience mentale sévère. Il commence à imiter les comportements inadaptés des autres enfants, etc. et n’a pas sa place dans l’école. L’autre enfant âgé de 8 ans a été exclu de plusieurs écoles à cause de nombreux comportements défis et n’était plus scolarisé depuis ses maternelles. Sa réorientation n’a pas encore été définie.

 

L’organisation de la classe

La Classe des Fusées est une classe de maturité I avec pédagogie adaptée pour enfants avec autisme. Elle est organisée selon le programme « TEACCH », qui se base sur une structure spatiale et temporelle. La méthode d’enseignement structuré nécessite donc une organisation approfondie de l’environnement et un arrangement prévisible des tâches et des événements, puisqu’elle s’appuie sur la compréhension de la façon dont les personnes avec autisme pensent et fonctionnent.

 

La structure spatiale

La Classe des Fusées était la plus petite des classes de l’école (+/- 25 m²); cependant, elle essayait de respecter au mieux l’organisation prévue par le programme « TEACCH » qui pour sept élèves nécessiterait préférablement le double d’espace.

 

En ce qui concerne l’organisation de l’environnement physique, des frontières sont définies par le placement de meubles et par des indices visuels (pictogrammes et photos sur les murs).

Un exemple : le coin accueil et le coin jeu libre sont séparés par un meuble noir.

 

 

 

 

Dans la classe, il y a également deux espaces de travail individuel (ETI) où les enfants travaillent en autonomie et un espace « grande table » qui sert pour les loisirs structurés, le travail en face à face, la collation et le repas. Pour ce deuxième espace, les enfants utilisent trois sets de table identifiés par des couleurs différentes (loisirs structurés = set de table bleu, le travail en face à face = set de table jaune, la collation et le repas = set de table rouge).

L’ETI est un espace isolé avec un bureau face au mur. Les activités qui sont à y faire se trouvent dans des casiers à gauche du bureau et sont déterminées à l’avance afin de structurer le temps de travail de l’enfant. A droite, se trouve une boite « FINI » dans laquelle l’enfant dépose les activités une fois que celles-ci sont terminées. Entre les deux (au centre du bureau) est prévu un espace afin que l’enfant puisse réaliser les activités.

La structure temporelle

Afin de réduire l’anxiété des enfants, le programme « TEACCH » propose l’utilisation d’une séquence prévisible d’événements en mettant un horaire individualisé en place. Celui-ci se présente sous la forme d’une structure chronologique transversale (du haut vers le bas et de manière « séquentielle ») et permet à l’enfant de prendre connaissance des activités prévues pour sa journée.

Un exemple : horaires par demi-journée et par journée entière

 

 

 

 

 

 

Dans la classe, quatre enfants disposent d'un horaire reprenant les activités pour une demi-journée (l’autre demi-journée se trouve au verso de l’horaire). Chaque moment de la journée est représenté par des pictogrammes. Parmi ces quatre enfants, trois d’entre eux ont leur horaire sur le mur et le quatrième sur son banc. Le cinquième enfant a un horaire au mur, reprenant les activités pour la journée entière et les moments de la journée sont également représentés par des pictogrammes. Le sixième enfant a un horaire « objet » au mur reprenant trois objets (exemple : toilettes, accueil, ETI), disposés l’un à la suite de l’autre et représentant les actions à réaliser. Chaque fois qu’une action est terminée, une autre est ajoutée sur l’horaire à la suite des deux actions restantes. Le septième enfant a un horaire « photo » accroché au mur. Pour cet horaire, les objets sont remplacés par les photos de ces objets.

Le système de l’horaire consiste à ce que l’enfant prenne le premier pictogramme qui se trouve sur son horaire, qu’il se rende à l’endroit indiqué pour faire l’action demandée et qu’il « scratche » ce pictogramme à l’endroit mentionné. Exemple : L’enfant doit travailler à l’espace de travail individuel (ETI), il prend son pictogramme            et il le place sur le bord de la table à côté du pictogramme similaire. Une fois qu’il a terminé son action, l’enfant reprend son pictogramme, retourne à son horaire et met son pictogramme dans une pochette « FINI » se trouvant au-dessus de son horaire. Ensuite, il prend le deuxième pictogramme et ainsi de suite.

Le cheminement ayant conduit au sujet de mon travail de fin d’études

Durant les trois semaines d’observation que j'ai effectuées en novembre 2016, j’ai pu déterminer, en collaboration avec l’institutrice, l’orientation qu’allait prendre mon Travail de Fin d'Etudes durant mon stage d’expérimentation. Pour cela, j’ai recueilli des informations auprès de ma maître de stage et j’ai observé attentivement les enfants afin d’identifier leurs besoins.

Le besoin de l’institutrice

Le besoin principal exprimé par l'institutrice concernait la problématique de la communication des sept élèves.

Quand j'ai débuté mon stage d’expérimentation, je comptais utiliser une grille d’analyse visant à déterminer le niveau de la communication réceptive et expressive des enfants. Toutefois après dix jours d’observation et à la suite de la visite de ma promotrice, j’ai finalement opté pour un travail plus spécifique sur la communication de deux enfants autistes non verbaux, âgés de 6 et 10 ans.

 

J’ai progressivement mis différents outils en place afin de favoriser leur communication expressive et réceptive. Ces outils ont été réfléchis avec leur institutrice, leur logopède et discutés avec des intervenants du SUSA[2].

Les besoins des enfants suivis

Les deux enfants étaient non verbaux et ne formulaient aucune demande au cours de la journée. Ils ne savaient pas comment exprimer une demande, n’arrivaient pas à se faire comprendre ou ne comprenaient pas pourquoi on leur demandait de faire quelque chose.

Le besoin principal des deux enfants consistait à favoriser leur communication afin de mieux se faire comprendre, mais également de mieux comprendre ce que l’on attendait d’eux.

Par ailleurs, l’un d’eux avait aussi comme besoin spécifique la compréhension de son horaire, nécessaire pour comprendre le déroulement de sa journée et les différentes transitions après chaque action.

 

Le besoin des parents

Dès le début de mon stage d’expérimentation, j’ai informé les parents des deux enfants choisis du suivi que j’allais mettre en place avec leur enfant. Je leur ai également demandé s’ils pouvaient me communiquer des informations importantes au sujet de la communication de leur enfant (par exemple, s’il faisait des demandes à la maison, s’il pointait des objets du doigt, etc.).

 

Malheureusement, je n’ai jamais obtenu de réponse à mon courrier. Par la suite, j’ai eu la possibilité de rencontrer ces deux familles à l’occasion de la réunion de parents.

Pour l’enfant 1 (X), la maman m’a interrogé à propos de la lettre que je lui avais adressée et a répondu à quelques-unes de mes questions concernant la communication de son enfant. J’ai profité de cette entrevue pour lui montrer le travail mis en place avec X. Celle-ci ne m’a pas exprimé de besoin particulier car le SUSA venait déjà en parallèle effectuer des observations à son domicile en vue précisément de proposer des solutions destinées à l’aider dans son quotidien.

 

Pour l’enfant 2 (Y), les parents ne parlent pas le français. Lors de la réunion, j’ai donc, avec l’aide d’une traductrice, simplement expliqué le travail que je réalisais avec Y. Toutefois, pour ce travail sur la communication, le problème qui s’est posé est que les parents de cet enfant ne comprennent pas le français et ne s’expriment qu’en arabe à la maison alors que Y apprend le français à l’école.

Pourquoi travailler avec ces deux enfants ?

J’ai décidé de travailler avec ces deux enfants car j’avais déjà constaté durant mon stage d’observation que ces deux enfants étaient émotionnellement fort affectés, l'enfant 1 (X) sous la forme de la frustration et l'enfant 2 (Y), sous la forme de la passivité. En effet, ils ne savaient pas comment demander quelque chose, ils n’arrivaient pas à se faire comprendre ou ils ne comprenaient pas pourquoi on leur demandait de faire quelque chose, etc. Leur besoin principal était donc de favoriser leur communication afin de mieux se faire comprendre, mais également de mieux comprendre ce que l’on attendait d’eux. Une fois ce besoin détecté et bien cerné, je me suis mise en recherche d’outils et une évaluation a été réalisée afin d’analyser leur niveau d’expression et de réception de la communication.

 

Cette même évaluation a été faite en fin de stage afin de voir l’évolution de chaque enfant.

Les objectifs de travail

Avec X, mes objectifs consistaient à évaluer sa communication (que sait-il faire ? qu’est-ce qu’il comprend ?), à changer et à choisir un support de communication afin de structurer ce qui se passait dans sa journée. Mon but final était de trouver des pistes de communication en utilisant ce qu’il savait faire et de travailler sur ses demandes car il n’en formulait aucune.

Avec Y, mes objectifs consistaient d’une part, à le familiariser avec sa farde de communication pour qu’il puisse faire des demandes supplémentaire lors des repas, à associer des photos et des objets, à effectuer un choix parmi plusieurs loisirs et en découvrir des nouveaux et d’autre part, à lui proposer des loisirs structurés avec ou sans adulte. Mon but final était de diversifier ses demandes à l’aide de sa farde de communication afin qu’il puisse formuler d'autres demandes et choisir des activités qui lui plairaient.

Les objectifs énoncés ci-dessus étaient en lien avec les objectifs que ces enfants avaient dans leur PIA[3].

 

[1] Une classe tremplin est une classe maternelle accueillant des enfants d’âge du primaire mais dont le maintien en maternelle est justifié.

[2] Le SUSA (Service Universitaire Spécialisé pour Personnes atteintes d'Autisme) a pour but principal l’accompagnement (le diagnostic, l'éducation, le logement, l'emploi, les loisirs, la participation communautaire et citoyenne, l'épanouissement personnel, social et affectif) tout au long de la vie, des personnes avec autisme et des personnes ayant une déficience intellectuelle associée à des troubles graves du comportement ainsi que le soutien à toutes les personnes intéressées à leur situation.

[3] Le Projet Individuel d’Apprentissage (PIA) est un outil réalisé en collaboration avec les parents et les différents intervenants qui assure un suivi tout au long du parcours scolaire de l’enfant. Le PIA est un outil évolutif permettant de cibler au mieux les compétences de l’enfant afin de lui proposer des pistes de projet de vie.

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